Loi du 11 mars 1957 relative à la Propriété littéraire et artistique

L'Assemblée nationale et le Conseil de la République ont délibéré,

L'Assemblée nationale a adopté,

Le Président de la République promulgue la loi dont la teneur suit,

TITRE Ier.- Des droits des auteurs.

Article 1er.-

L'auteur d'une oeuvre de l'esprit jouit sur cette oeuvre, du seul fait de sa création, d'un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous.

Ce droit comporte des attributs d'ordre intellectuel et moral, ainsi que des attributs d'ordre patrimonial, qui sont déterminés par la présente loi.

L'existence ou la conclusion d'un contrat de louage d'ouvrage ou de service par l'auteur d'une oeuvre de l'esprit n'emporte aucune dérogation à la jouissance du droit reconnu par l'alinéa premier.

Article 2.-

Les dispositions de la présente loi protègent les droits des auteurs sur toutes les oeuvres de l'esprit, quels qu'en soient le genre, la forme d'expression, le mérite ou la destination.

Article 3.-

Sont considérés notamment comme oeuvres de l'esprit au sens de la présente loi: les livres, brochures et autres écrits littéraires, artistiques et scientifiques; les conférences, allocutions, sermons, plaidoiries et autres oeuvres de même nature; les oeuvres dramatiques ou dramatico-musicales; les oeuvres chorégraphiques et les pantomimes dont la mise en oeuvre est fixée par écrit ou autrement; les compositions musicales avec ou sans paroles; les oeuvres cinématographiques et celles obtenues par un procédé analogue à la cinématographie; les oeuvres de dessin, de peinture, d'architecture, de sculpture, de gravure, de lithographie; les oeuvres photographiques de caractère artistique ou documentaire et celles de même caractère obtenues par un procédé analogue à la photographie; les oeuvres des arts appliqués; les illustrations, les cartes géographiques; les plans, croquis et ouvrages plastiques relatifs à la géographie, à la topographie, à l'architecture ou aux sciences.

Article 4.-

Les auteurs de traductions, d'adaptations, transformations ou arrangements des oeuvres de l'esprit jouissent de la protection instituée par la présente loi, sans préjudice des droits de l'auteur de l'oeuvre originale. Il en est de même des auteurs d'anthologie ou recueils d'oeuvres diverses qui, par le choix et la disposition des matières, constituent des créations intellectuelles.

Article 5.-

Le titre d'une oeuvre de l'esprit, dès lors qu'il présente un caractère original, est protégé comme d'oeuvre elle-même.

Nul ne peut, même si l'oeuvre n'est plus protégée dans les termes des articles 21 et 22, utiliser ce titre pour individualiser une oeuvre du même genre, dans des conditions susceptibles de provoquer une confusion.

Article 6.-

L'auteur jouit du droit au respect de son nom, de sa qualité et de son oeuvre.

Ce droit est attaché à sa personne.

Il est perpétuel, inaliénable et imprescriptible.

Il est transmissible à cause de mort aux héritiers de l'auteur.

L'exercice peut en être conféré à un tiers en vertu de dispositions testamentaires.

Article 7.-

L'oeuvre est réputée créée, indépendamment de toute divulgation publique, du seul fait de la réalisation, même inachevée, de la conception de l'auteur.

Article 8.-

La qualité d'auteur appartient, sauf preuve contraire, à celui ou à ceux sous le nom de qui l'oeuvre est divulguée.

Article 9.-

Est dite oeuvre de collaboration, l'oeuvre à la création de laquelle ont concouru plusieurs personnes physiques.

Est dite composite, l'oeuvre nouvelle à laquelle est incorporée une oeuvre préexistante sans la collaboration de l'auteur de cette dernière.

Est dite collective, l'oeuvre créée sur l'initiative d'une personne physique ou morale qui l'édite, la publie et la divulgue sous sa direction et son nom et dans laquelle la contribution personnelle des divers auteurs participant à son élaboration se fond dans l'ensemble en vue duquel elle est conçue, sans qu'il soit possible d'attribuer à chacun d'eux un droit distinct sur l'ensemble réalisé.

Article 10.-

L'oeuvre de collaboration est la propriété commune des coauteurs.

Les coauteurs doivent exercer leurs droits d'un commun accord.

En cas de désaccord, il appartiendra à la juridiction civile de statuer.

Lorsque la participation de chacun des coauteurs relève de genres différents, chacun pourra, sauf convention contraire, exploiter séparément sa contribution personnelle, sans toutefois porter préjudice à l'exploitation de l'oeuvre commune.

Article 11.-

Les auteurs des oeuvres pseudonymes et anonymes jouissent sur celles-ci des droits reconnus par l'article 1er.

Ils sont représentés dans l'exercice de ces droits par l'éditeur ou le publicateur originaire, tant qu'ils n'auront pas fait connaître leur identité civile et justifié de leur qualité.

La déclaration prévue à l'alinéa précédent pourra être faite par testament; toutefois, seront maintenus les droits qui auraient pu être acquis par des tiers antérieurement.

Les dispositions des alinéas 2 et 3 ne sont pas applicables lorsque le pseudonyme adopté par l'auteur ne laisse aucun doute sur son identité civile.

Article 12.-

L'oeuvre composite est la propriété de l'auteur qui l'a réalisée, sous réserve des droits de l'auteur de l'oeuvre préexistante.

Article 13.-

L'oeuvre collective est, sauf preuve contraire, la propriété de la personne physique ou morale sous le nom de laquelle elle est divulguée.

Cette personne est investie des droits de l'auteur.

Article 14.-

Ont la qualité d'auteur d'une oeuvre cinématographique la ou les personnes physiques qui réalisent la création intellectuelle de cette oeuvre.

Sont présumés, sauf preuve contraire, coauteurs d'une oeuvre cinématographique réalisée en collaboration:

1° L'auteur du scénario;

2° L'auteur de l'adaptation;

3° L'auteur du texte parlé;

4° L'auteur des compositions musicales avec ou sans paroles spécialement réalisées pour l'oeuvre;

5° Le réalisateur.

Lorsque l'oeuvre cinématographique est tirée d'une oeuvre ou d'un scénario préexistants encore protégés, les auteurs de l'oeuvre originaire sont assimilés aux auteurs de l'oeuvre nouvelle.

Article 15.-

Si l'un des auteurs refuse d'achever sa contribution à l'oeuvre cinématographique ou se trouve dans l'impossibilité d'achever cette contribution par suite de force majeure, il ne pourra s'opposer à l'utilisation, en vue de l'achèvement de l'oeuvre, de la partie de cette contribution déjà réalisée. Il aura, pour cette contribution, la qualité d'auteur et jouira des droits qui en découlent.

Sauf convention contraire, chacun des auteurs de l'oeuvre cinématographique peut disposer librement de la partie de l'oeuvre qui constitue sa contribution personnelle en vue de son exploitation dans un genre différent et dans les limites fixées par l'article 10.

Article 16.-

L'oeuvre cinématographique est réputée achevée lorsque la première «copie standard» a été établie d'un commun accord entre le réalisateur ou éventuellement les coauteurs et le producteur.

Les droits propres des auteurs tels qu'ils sont définis à l'article 6 ne peuvent être exercés par eux que sur l'oeuvre cinématographique achevée, sauf éventuellement application de l'article 1382 du code civil à l'encontre de celui dont la faute aurait empêché l'achèvement du film.

Article 17.-

Le producteur d'une oeuvre cinématographique est la personne physique ou morale qui prend l'initiative et la responsabilité de la réalisation de l'oeuvre.

Le producteur peut être l'auteur ou l'un des coauteurs de l'oeuvre s'il répond à la définition de l'article 14.

Les auteurs de l'oeuvre cinématographique autres que l'auteur de compositions musicales, avec ou sans paroles, sont liés au producteur par un contrat qui, sauf clause contraire, emporte cession à son profit du droit exclusif d'exploitation cinématographique, sans préjudice des droits reconnus à l'auteur par les dispositions du titre II, et notamment des articles 26 et 35.

Article 18.-

Ont la qualité d'auteur d'une oeuvre radiophonique ou radiovisuelle la ou les personnes physiques qui assurent la création intellectuelle de cette oeuvre.

Les dispositions de l'article 14, dernier alinéa, et de l'article 15 sont applicables aux oeuvres radiophoniques ou radiovisuelles.

Article 19.-

L'auteur a seul le droit de divulguer sont oeuvre. Sous réserve, en ce qui concerne les oeuvres cinématographiques, des dispositions de l'article 17, il détermine le procédé de divulgation et fixe les conditions de celle-ci.

Après sa mort, le droit de divulgation de ses oeuvres posthumes est exercé leur vie durant par le ou les exécuteurs testamentaires désignés par l'auteur. A leur défaut, ou après leur décès, et sauf volonté contraire de l'auteur, ce droit est exercé dans l'ordre suivant: par les descendants, par le conjoint contre lequel n'existe pas un jugement passé en force de chose jugée de séparation de corps ou qui n'a pas contracté un nouveau mariage, par les héritiers autres que les descendants qui recueillent tout ou partie de la succession et par les légataires universels ou donataires de l'universalité des biens à venir.

Ce droit peut s'exercer même après l'expiration du droit exclusif d'exploitation déterminé à l'article 21.

Article 20.-

En cas d'abus notoire dans l'usage ou le non usage du droit de divulgation de la part des représentants de l'auteur décédé visés à l'article précédent, le tribunal civil peut ordonner toute mesure appropriée. Il en est de même s'il y a conflit entre lesdits représentants, s'il n'y a pas d'ayant droit connu ou en cas de vacance ou de déshérence.

Le tribunal peut être saisi notamment par le ministre chargé des arts et des lettres.

Article 21.-

L'auteur jouit, sa vie durant, du droit exclusif d'exploiter son oeuvre sous quelque forme que ce soit et d'en tirer un profit pécuniaire.

Au décès de l'auteur, ce droit persiste au bénéfice de ses ayants droit pendant l'année civile en cours et les cinquante années qui suivent.

Pour les oeuvres de collaboration, l'année civile prise en considération est celle de la mort du dernier vivant des collaborateurs.

Article 22.-

Pour les oeuvres pseudonymes ou collectives, la durée du droit exclusif est de cinquante années à compter du 1er janvier de l'année civile suivant celle de la publication. La date de publication est déterminée par tout mode de preuve du droit commun, et notamment par le dépôt légal.

En cas de publication échelonnée d'une oeuvre collective, le délai court à compter du 1er janvier de l'année civile qui suit la publication de chaque élément. Toutefois, si la publication est entièrement réalisée dans un délai de vingt ans à compter de la publication d'un premier élément, la durée du droit exclusif pour l'ensemble de l'oeuvre prend fin seulement à l'expiration de la cinquantième année suivant celle de la publication du dernier élément.

En ce qui concerne les oeuvres anonymes ou pseudonymes, si le ou les auteurs se sont fait connaître, la durée du droit d'exploitation est celle afférente à la catégorie de l'oeuvre considérée et la période de protection légale commence à courir dans les conditions prévues à l'article 21.

Article 23.-

Pour les oeuvres posthumes, la durée du droit exclusif est de cinquante années à compter de la date de publication de l'oeuvre.

Le droit d'exploitation des oeuvres posthumes appartient aux ayants droit de l'auteur si l'oeuvre est divulguée au cours de la période prévue à l'article 21.

Si la divulgation est effectuée à l'expiration de cette période, il appartient aux propriétaires, par succession ou à d'autres titres, de l'oeuvre, qui effectuent ou font effectuer la publication.

Les oeuvres posthumes doivent faire l'objet d'une publication séparée, sauf dans le cas où elles ne constituent qu'un fragment d'une oeuvre précédemment publiée. Elles ne peuvent être jointes à des oeuvres du même auteur précédemment publiées que si les ayants droit de l'auteur jouissent encore sur celles-ci du droit d'exploitation.

Article 24.-

Pendant la période prévue à l'article 21, le conjoint survivant, contre lequel n'existe pas un jugement passé en force de chose jugée de séparation de corps bénéficie, quel que soit le régime matrimonial et indépendamment des droits d'usufruit qu'il tient de l'article 767 du code civil sur les autres biens de la succession, de l'usufruit du droit d'exploitation dont l'auteur n'aura pas disposé. Toutefois, si l'auteur laisse des héritiers à réserve, cet usufruit est réduit au profit des héritiers, suivant les proportions et distinctions établies par les articles 913 et 915 du code civil.

Ce droit s'éteint au cas où le conjoint contracte un nouveau mariage.

Article 25.-

Sous tous les régimes matrimoniaux et à peine de nullité de toutes clauses contraires portées au contrat de mariage, le droit de divulguer l'oeuvre, de fixer les conditions de son exploitation et d'en défendre l'intégrité reste propre à l'époux auteur ou à celui des époux à qui de tels droits ont été transmis. Ce droit ne peut être apporté en dot, ni acquis par la communauté ou par une société d'acquêts.

Les produits pécuniaires provenant de l'exploitation d'une oeuvre de l'esprit ou de la cession totale ou partielle du droit d'exploitation sont soumis aux règles applicables aux meubles, suivant le régime matrimonial adopté, uniquement lorsqu'ils ont été acquis pendant le mariage; il en est de même des économies réalisées de ces chefs.

Les dispositions prévues à l'alinéa précédent ne s'appliquent pas lorsque le mariage a été célébré antérieurement à l'entrée en vigueur de la présente loi.

Les dispositions législatives relatives à la contribution des époux aux charges du ménage et aux biens réservés de la femme mariée sont applicables aux produits pécuniaires visés à l'alinéa 2 du présent article.

TITRE II.- De l'exploitation des droits patrimoniaux de l'auteur.

Article 26.

Le droit d'exploitation appartenant à l'auteur comprend:

Le droit de représentation;

Le droit de reproduction.

Article 27.-

La représentation consiste dans la communication directe de l'oeuvre au public, notamment par voie de:

Récitation publique;

Exécution lyrique;

Représentation dramatique;

Présentation publique;

Diffusion, par quelque procédé que ce soit, des paroles, des sons ou des images;

Projection publique;

Transmission de l'oeuvre radiodiffusée par le moyen d'un haut-parleur et éventuellement d'un écran de radio-télévision placé dans un lieu public.

Article 28.-

La reproduction consiste dans la fixation matérielle de l'oeuvre par tous procédés qui permettent de la communiquer au public d'une manière indirecte.

Elle peut s'effectuer notamment par imprimerie, dessin, gravure, photographie, moulage et tout procédé des arts graphiques et plastiques, enregistrement mécanique cinématographique ou magnétique.

Pour les oeuvres d'architecture, la reproduction consiste également dans l'exécution répétée d'un plan ou projet type.

Article 29.-

La propriété incorporelle définie par l'article 1er est indépendante de la propriété de l'objet matériel.

L'acquéreur de cet objet n'est investi, du fait de cette acquisition, d'aucun des droits prévus par la présente loi, sauf dans les cas prévus par les dispositions de l'article 23, alinéas 2 et 3.

Ces droits subsistent en la personne de l'auteur ou de ses ayants droit qui, pourtant, ne pourront exiger du propriétaire de l'objet matériel la mise à leur disposition de cet objet pour l'exercice desdits droits. Néanmoins, en cas d'abus notoire du propriétaire empêchant l'exercice du droit de divulgation, le tribunal civil pourra prendre toute mesure appropriée, conformément aux dispositions de l'article 20.

Article 30.-

Le droit de représentation et le droit de reproduction sont cessibles à titre gratuit ou à titre onéreux.

La cession du droit de représentation n'emporte pas celle du droit de reproduction.

La cession du droit de reproduction n'emporte pas celle du droit de représentation.

Lorsqu'un contrat comporte cession totale de l'un des deux droits visés au présent article, la portée en est limitée aux modes d'exploitation prévus au contrat.

Article 31.-

Les contrats de représentation et d'édition définis au titre III de la présente loi doivent être constatés par écrit. Il en est de même des autorisations gratuites d'exécution.

Dans tous les autres cas, les dispositions des articles 1341 à 1348 du code civil sont applicables.

La transmission des droits de l'auteur est subordonnée à la condition que chacun des droits cédés fasse l'objet d'une mention distincte dans l'acte de cession et que le domaine d'exploitation des droits cédés soit délimité quant à son étendue et à sa destination, quant au lieu et quant à la durée.

Lorsque des circonstances spéciales l'exigent, le contrat peut être valablement conclu par échange de télégrammes, à condition que le domaine d'exploitation des droits cédés soit délimité conformément aux termes du troisième alinéa du présent article.

Article 32.

Nonobstant la cession de son droit d'exploitation, l'auteur, même postérieurement à la publication de son oeuvre, jouit d'un droit de repentir ou de retrait vis-à-vis du cessionnaire. Il ne peut toutefois exercer ce droit qu'à charge d'indemniser préalablement le cessionnaire du préjudice que ce repentir ou ce retrait peut lui causer.

Lorsque, postérieurement à l'exercice du droit de repentir ou de retrait, l'auteur décide de faire publier son oeuvre, il est tenu d'offrir par priorité ses droits d'exploitation au cessionnaire qu'il avait originairement choisi et aux conditions originairement déterminées.

Article 33.-

La cession globale des oeuvres futures est nulle.

Article 34.-

En ce qui concerne l'édition, est licite la stipulation par laquelle l'auteur s'engage à accorder un droit de préférence à un éditeur pour l'édition de ses oeuvres futures de genres nettement déterminés.

Ce droit est limité pour chaque genre à cinq ouvrages nouveaux, à compter du jour de la signature du contrat d'édition conclu pour la première oeuvre ou à la production de l'auteur réalisée dans un délai de cinq années à compter du même jour.

L'éditeur doit exercer le droit qui lui est reconnu en faisant connaître par écrit sa décision à l'auteur, dans le délai de trois mois à dater du jour de la remise par celui-ci de chaque manuscrit définitif.

Lorsque l'éditeur bénéficiant du droit de préférence aura refusé successivement deux ouvrages nouveaux présentés par l'auteur dans le genre déterminé au contrat, l'auteur pourra reprendre immédiatement et de plein droit sa liberté quant aux oeuvres futures qu'il produira dans ce genre. Il devra toutefois, au cas où il aurait reçu sur ses oeuvres futures des avances du premier éditeur, effectuer préalablement le remboursement de celles-ci.

Article 35.-

La cession par l'auteur de ses droits sur son oeuvre peut être totale ou partielle. Elle doit comporter au profit de l'auteur la participation proportionnelle aux recettes provenant de la vente ou de l'exploitation.

Toutefois, la rémunération de l'auteur peut être évaluée forfaitairement dans les cas suivants:

1° La base de calcul de la participation proportionnelle ne peut être pratiquement déterminée;

2° Les moyens de contrôler l'application de la participation font défaut;

3° Les frais des opérations de calcul et de contrôle seraient hors de proportion avec les résultats à atteindre;

4° La nature ou les conditions de l'exploitation rendent impossible l'application de la règle de la rémunération proportionnelle, soit que la contribution de l'auteur ne constitue pas l'un des éléments essentiels de la création intellectuelle de l'oeuvre, soit que l'utilisation de l'oeuvre ne présente qu'un caractère accessoire par rapport à l'objet exploité.

Est également licite la conversion entre les parties, à la demande de l'auteur, des droits provenant des contrats en vigueur en annuités forfaitaires pour des durées à déterminer entre les parties.

Article 36.-

En ce qui concerne l'édition de librairie, la rémunération de l'auteur peut également faire l'objet d'une rémunération forfaitaire pour la première édition, avec l'accord formellement exprimé de l'auteur, dans les cas suivants:

Ouvrages scientifique ou technique;

Anthologies et encyclopédies;

Préfaces, annotations, introductions, présentations;

Illustrations d'un ouvrage;

Editions de luxe à tirage limité;

Livres de prières;

A la demande du traducteur pour les traductions;

Editions populaires à bon marché;

Albums bon marché pour enfants.

Peuvent également faire l'objet d'une rémunération forfaitaire les cessions de droits à ou par une personne ou une entreprise établie à l'étranger.

En ce qui concerne les oeuvres de l'esprit publiées dans les journaux et recueils périodiques de tout ordre et par les agences de presse, la rémunération de l'auteur, lié à l'entreprise d'information par un contrat de louage d'ouvrage ou de service, peut également être fixé forfaitairement. Pour toutes les oeuvres publiées ainsi dans un journal ou recueil périodique, l'auteur conserve, sauf stipulation contraire, le droit de les faire reproduire et de les exploiter, sous quelque forme que ce soit, pourvu que cette reproduction ou cette exploitation ne soit pas de nature à faire concurrence à ce journal ou à ce recueil périodique.

L'auteur seul a le droit de réunir ses articles et ses discours en recueil et de les publier ou d'en autoriser la publication sous cette forme.

Article 37.-

En cas de cession du droit d'exploitation, lorsque l'auteur aura subi un préjudice de plus de sept douzièmes dû à une lésion ou à une prévision insuffisante des produits de l'oeuvre, il pourra provoquer la revision des conditions de prix du contrat.

Cette demande ne pourra être formée que dans le cas où l'oeuvre aura été cédée moyennant une rémunération forfaitaire.

La lésion sera appréciée en considération de l'ensemble de l'exploitation par le cessionnaire des oeuvres de l'auteur qui se prétend lésé.

Article 38.-

La clause d'une cession qui tend à conférer le droit d'exploiter l'oeuvre sous une forme non prévisible ou non prévue à la date du contrat doit être expresse et stipuler une participation corrélative aux profits d'exploitation.

Article 39.-

En cas de cession partielle, l'ayant cause est substitué à l'auteur dans l'exercice des droits cédés, dans les conditions, les limites et pour la durée prévues au contrat, et à charge de rendre compte.

Article 40.-

Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite.

Il en est de même pour la traduction, l'adaptation ou la transformation, l'arrangement ou la reproduction par un art ou un procédé quelconque.

Article 41.-

Lorsque l'oeuvre a été divulguée, l'auteur ne peut interdire:

1° Les représentations privées et gratuites effectuées exclusivement dans un cercle de famille;

2° Les copies ou reproductions strictement réservées à l'usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective, à l'exception des copies des oeuvres d'art destinées à être utilisées pour des fins identiques à celles pour lesquelles l'oeuvre originale a été créée;

3° Sous réserve que soient indiqués clairement le nom de l'auteur et la source:

Les analyses et courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d'information de l'oeuvre à laquelle elles sont incorporées;

Les revues de presse;

La diffusion, même intégrale, par la voie de la presse ou de la radiodiffusion, à titre d'information d'actualité, des discours destinés au public prononcés dans les assemblées politiques, administratives, judiciaires ou académiques, ainsi que dans les réunions publiques d'ordre politique et les cérémonies officielles;

4° La parodie, le pastiche et la caricature, compte tenu des lois du genre.

Article 42.-

Les auteurs d'oeuvres graphiques et plastiques ont, nonobstant toute cession de l'oeuvre originale, un droit inaliénable de participation au produit de toute vente de cette oeuvre faite aux enchères publiques ou par l'intermédiaire d'un commerçant.

Après le décès de l'auteur, ce droit de suite subsiste au profit de ses héritiers et, pour l'usufruit prévu à l'article 24, de son conjoint, à l'exclusion de tous légataires et ayants cause, pendant l'année civile en cours et les cinquante années suivantes.

Le tarif du droit perçu est fixé uniformément à 3 p. 100 applicables seulement à partir d'un prix de vente de 10.000 F.

Ce droit est prélevé sur le prix de vente de chaque oeuvre et sur le total du prix sans aucune déduction à la base.

Un règlement d'administration publique déterminera les conditions dans lesquelles les auteurs feront valoir à l'occasion des ventes prévues au premier alinéa les droits qui leur sont reconnus par les dispositions du présent article.

TITRE III.- Du contrat de représentation et du contrat d'édition.

CHAPITRE Ier.- Du contrat de représentation.

Article 43.-

Le contrat de représentation est celui par lequel l'auteur d'une oeuvre de l'esprit et ses ayants droit autorisent une personne physique ou morale à représenter ladite oeuvre à des conditions qu'ils déterminent.

Est dit contrat général de représentation le contrat par lequel un organisme professionnel d'auteurs confère à un entrepreneur de spectacles la faculté de représenter, pendant la durée du contrat, les oeuvres actuelles ou futures, constituant le répertoire dudit organisme aux conditions déterminées par l'auteur ou ses ayants droit.

Dans le cas prévu à l'alinéa précédent, il peut être dérogé aux dispositions de l'article 33.

Article 44.-

Le contrat de représentation est conclu pour une durée limitée ou pour un nombre déterminé de communications au public.

Sauf stipulation expresse de droits exclusifs, il ne confère à l'entrepreneur de spectacles aucun monopole d'exploitation.

La validité des droits exclusifs accordés par un auteur dramatique ne peut excéder cinq années; l'interruption des représentations au cours de deux années consécutives y met fin de plein droit.

L'entrepreneur de spectacles ne peut transférer le bénéfice de son contrat sans l'assentiment formel et donné par écrit de l'auteur ou de son représentant.

Article 45.-

Sauf stipulation contraire, l'autorisation de radiodiffuser l'oeuvre ou de la communiquer publiquement selon tout autre mode de diffusion sans fil, des signes, des sons ou des images, couvre l'ensemble des communications faites par l'organisme bénéficiaire de la cession.

Conformément aux dispositions de l'article 30, l'autorisation de radiodiffuser n'implique pas l'autorisation d'enregistrer l'oeuvre radiodiffusée au moyen d'instruments portant fixation des sons ou des images.

Toutefois, exceptionnellement, en raison de l'intérêt national qu'ils représentent ou de leur caractère de documentation, certains enregistrements pourront être autorisés. Leurs modalités de réalisation et d'utilisation seront fixées par les parties ou, à défaut d'accord, par décision singée conjointement par le ministre chargé des beaux-arts et le ministre chargé de l'information. Ces enregistrements pourront être conservés dans les archives officielles.

L'autorisation de radiodiffuser n'implique par l'autorisation de communiquer publiquement par haut-parleur ou par tout autre instrument analogue transmetteur de signes, de sons ou d'images, l'oeuvre radiodiffusée.

Article 46.-

L'entrepreneur de spectacles est tenu de déclarer à l'auteur ou à ses représentants le programme exact des représentations ou exécutions publiques et de leur fournir un état justifié de ses recettes. Il doit acquitter aux échéances prévues, entre les mains de l'auteur ou de ses représentants, le montant des redevances stipulées.

Toutefois, les communes, pour l'organisation de leurs fêtes locales et publiques, et les sociétés d'éducation populaire, agréées par le ministre de l'éducation nationale, pour les séances organisées par elles dans le cadre de leur activité, doivent bénéficier d'une réduction de ces redevances.

Article 47.-

L'entrepreneur de spectacles doit assurer la représentation ou l'exécution publique dans des conditions techniques propres à garantir le respect des droits intellectuels et moraux de l'auteur.

CHAPITRE II.- Du contrat d'édition.

Article 48.-

Le contrat d'édition est le contrat par lequel l'auteur d'une oeuvre de l'esprit ou ses ayants droit cèdent à des conditions déterminées à une personne appelée éditeur le droit de fabriquer ou de faire fabriquer en nombre des exemplaires de l'oeuvre, à charge pour elle d'en assurer la publication et la diffusion.

Article 49.-

Ne constitue pas un contrat d'édition, au sens de l'article 48, le contrat dit: à compte d'auteur.

Par un tel contrat, l'auteur ou ses ayants droit versent à l'éditeur une rémunération convenue, à charge par ce dernier de fabriquer en nombre, dans la forme et suivant les modes d'expression déterminés au contrat, des exemplaires de l'oeuvre et d'en assurer la publication et la diffusion.

Ce contrat constitue un louage d'ouvrage régi par la convention, les usages et les dispositions des articles 1787 et suivants du code civil.

Article 50.-

Ne constitue pas un contrat d'édition, au sens de l'article 48, le contrat dit: de compte à demi.

Par un tel contrat, l'auteur ou ses ayants droit chargent un éditeur de fabriquer, à ses frais et en nombre, des exemplaires de l'oeuvre, dans la forme et suivant les modes d'expression déterminés au contrat, et d'en assurer la publication et la diffusion, moyennant l'engagement réciproquement contracté de partager les bénéfices et les pertes d'exploitation, dans la proportion prévue.

Ce contrat constitue une association en participation dans les termes des articles 42 et suivants du code de commerce; il est régi par la convention et les usages.

Article 51.-

Le contrat d'édition doit indiquer le nombre minimum d'exemplaires constituant le premier tirage. Toutefois, cette obligation ne s'applique pas aux contrats prévoyant un minimum de droits d'auteur garantis par l'éditeur.

Article 52.-

Le contrat peut prévoir soit une rémunération proportionnelle aux produits d'exploitation, soit, dans les cas prévus aux articles 35 et 36, une rémunération forfaitaire.

L'éditeur est tenu d'effectuer ou de faire effectuer la fabrication selon les conditions, dans la forme et suivant les modes d'expression prévus au contrat.

Article 53.-

Le consentement personnel et donné par écrit de l'auteur est obligatoire.

Sans préjudice des dispositions qui régissent les contrats passés par les mineurs et les interdits, le consentement est même exigé lorsqu'il s'agit d'un auteur légalement incapable, sauf si celui-ci est dans l'impossibilité physique de donner son consentement.

Les dispositions de l'alinéa précédent ne sont pas applicables lorsque le contrat d'édition est souscrit par les ayants droit de l'auteur.

Article 54.-

L'auteur doit garantir à l'éditeur l'exercice paisible et, sauf convention contraire, exclusif du droit cédé.

Il est tenu de faire respecter ce droit et de le défendre contre toutes atteintes qui lui seraient portées.

Article 55.-

L'auteur doit mettre l'éditeur en mesure de fabriquer et de diffuser les exemplaires de l'oeuvre.

Il doit remettre à l'éditeur, dans le délai prévu au contrat, l'objet de l'édition en une forme qui permette la fabrication normale.

Sauf convention contraire ou impossibilités d'ordre technique, l'objet de l'édition fourni par l'auteur reste la propriété de celui-ci. L'éditeur en sera responsable pendant le délai d'un an après l'achèvement de la fabrication.

Article 56.-

L'éditeur doit fabriquer l'édition dans la forme convenue.

Il ne peut, sans l'autorisation écrite de l'auteur, apporter à l'oeuvre aucune modification.

Il doit, sauf convention contraire, faire figurer sur chacun des exemplaires le nom, le pseudonyme ou la marque de l'auteur.

A défaut de convention spéciale, l'éditeur doit réaliser l'édition dans un délai fixé par les usages de la profession.

En cas de contrat à durée déterminée, les droits du cessionnaire s'éteignent de plein droit à l'expiration du délai, sans qu'il soit besoin de mise en demeure.

L'éditeur pourra toutefois procéder, pendant trois ans après cette expiration, à l'écoulement, au prix normal, des exemplaires restant en stock, à moins que l'auteur ne préfère acheter ces exemplaires moyennant un prix qui sera fixé à dire d'experts à défaut d'accord amiable, sans que cette faculté reconnue au premier éditeur interdise à l'auteur de faire procéder à une nouvelle édition dans un délai de trente mois.

Article 57.-

L'éditeur est tenu d'assurer à l'oeuvre une exploitation permanente et suivie et une diffusion commerciale, conformément aux usages de la profession.

Article 58.-

En vue du payement des redevances qui leur sont dues pour les trois dernières années à l'occasion de la cession, de l'exploitation ou de l'utilisation de leurs oeuvres, telles qu'elles sont définies à l'article 3 de la présente loi, les auteurs, compositeurs et artistes bénéficient du privilège prévu au paragraphe 4° de l'article 2101 et à l'article 2104 du code civil.

Article 59.-

L'éditeur est tenu de rendre compte.

L'auteur pourra, à défaut de modalités spéciales prévues au contrat, exiger au moins une fois l'an la production par l'éditeur d'un état mentionnant le nombre d'exemplaires fabriqués en cours d'exercice et précisant la date et l'importance des tirages et le nombre des exemplaires en stock.

Sauf usage ou conventions contraires, cet état mentionnera également le nombre des exemplaires vendus par l'éditeur, celui des exemplaires inutilisables ou détruits par cas fortuit ou force majeure, ainsi que le montant des redevances dues ou versées à l'auteur.

Article 60.-

L'éditeur est tenu de fournir à l'auteur toutes justifications propres à établir l'exactitude de ses comptes.

Faute par l'éditeur de fournir les justifications nécessaires, il y sera contraint par le tribunal, dans les termes de l'article 15 du code de commerce.

Article 61.-

Ni la faillite, ni le règlement judiciaire de l'éditeur n'entraînent la résolution du contrat.

Si l'exploitation du fonds est continuée par le syndic, dans les conditions prévues aux articles 61 et suivants du décret nº 55-583 du 20 mai 1955, le syndic est tenu de toutes les obligations de l'éditeur.

En cas de vente du fonds de commerce, dans les termes de l'article 62 du décret nº 55-583 du 20 mai 1955, l'acquéreur est, de même, tenu des obligations du cédant.

Lorsque l'exploitation du fonds n'est pas continuée par le syndic et qu'aucune cession dudit fonds n'est intervenue dans le délai d'une année à partir du jugement déclaratif de faillite, le contrat d'édition peut, à la demande de l'auteur, être résilié.

Le syndic ne peut procéder à la vente en solde des exemplaires fabriqués ni à leur réalisation dans les conditions prévues aux articles 61 et 62 du décret nº 55-583 du 20 mai 1955, que quinze jours au moins après avoir averti l'auteur de son intention, par lettre recommandée avec demande d'accusé de réception.

L'auteur possède, sur tout ou partie des exemplaires, un droit de préemption. A défaut d'accord, le prix de rachat sera fixé à dire d'experts.

Article 62.-

L'éditeur ne peut transmettre, à titre gratuit ou onéreux, ou par voie d'apport en société, le bénéfice du contrat d'édition à des tiers, indépendamment de son fonds de commerce, sans avoir préalablement obtenu l'autorisation de l'auteur.

En cas d'aliénation du fonds de commerce, si celle-ci est de nature à compromettre gravement les intérêts matériels ou moraux de l'auteur, celui-ci est fondé à obtenir réparation même par voie de résiliation du contrat.

Lorsque le fonds de commerce d'édition était exploité en société ou dépendait d'une indivision, l'attribution du fonds à l'un des ex-associés ou à l'un des co-indivisaires, en conséquence de la liquidation ou du partage, ne sera, en aucun cas, considérée comme une cession.

Article 63.-

Le contrat d'édition prend fin, indépendamment des cas prévus par le droit commun ou par les articles précédents, lorsque l'éditeur procède à la destruction totale des exemplaires.

La résiliation a lieu de plein droit lorsque, sur mise en demeure de l'auteur lui impartissant un délai convenable, l'éditeur n'a pas procédé à la publication de l'oeuvre ou, en cas d'épuisement, à sa réédition.

L'édition est considérée comme épuisée si deux demandes de livraison d'exemplaires adressés à l'éditeur ne sont pas satisfaites dans les trois mois.

En cas de mort de l'auteur, si l'oeuvre est inachevée, le contrat est résolu en ce qui concerne la partie de l'oeuvre non terminée, sauf accord entre l'éditeur et les ayants droit de l'auteur.

TITRE IV.- Procédure et sanctions.

CHAPITRE Ier.- Procédure.

Article 64.-

Toutes les contestations relatives à l'application des dispositions de la présente loi qui relèvent des juridictions de l'ordre judiciaire seront portées devant les tribunaux compétents, sans préjudice du droit pour la partie lésée de se pourvoir devant la juridiction répressive dans les termes du droit commun.

Article 65.-

Les contestations relatives à l'application de la présente loi sont soumises aux dispositions ci-après du présent chapitre.

Les organismes de défense professionnelle régulièrement constitués ont qualité pour ester en justice pour la défense des intérêts dont ils ont statutairement la charge.

Article 66.-

Les commissaires de police et, dans les lieux où il n'y a pas de commissaire de police, les juges de paix sont tenus, à la demande de tout auteur d'une oeuvre protégée par la présente loi ou de ses ayants droit, de saisir les exemplaires constituant une reproduction illicite de cette oeuvre.

Si la saisie doit avoir pour effet de retarder ou de suspendre des représentations ou des exécutions publiques en cours ou déjà annoncées, une autorisation spéciale doit être obtenue du président du tribunal civil, par ordonnance rendue sur requête.

Le président du tribunal civil peut également, dans la même forme, ordonner:

La suspension de toute fabrication en cours tendant à la reproduction illicite d'1ne oeuvre;

La saisie, même en dehors des heures prévues par l'article 1037 du code de procédure civile, des exemplaires constituant une reproduction illicite de l'oeuvre, déjà fabriqués ou en cours de fabrication, des recettes réalisées, ainsi que des exemplaires illicitement utilisés;

La saisie des recettes provenant de toute reproduction, représentation ou diffusion, par quelque moyen que ce soit, d'une oeuvre de l'esprit, effectuée en violation des droits de l'auteur, visée à l'article 426 du Code pénal.

Le président du tribunal civil peut, dans les ordonnances prévues ci-dessus, ordonner la constitution préalable par le saisissant d'un cautionnement convenable.

Article 67.-

Dans les trente jours de la date du procès-verbal de la saisie, prévue à l'alinéa premier de l'article 66, ou de la date de l'ordonnance prévue au même article, le saisi ou le tiers saisi peuvent demander au président du tribunal civil de prononcer la mainlevée de la saisie ou d'en cantonner les effets, ou encore d'autoriser la reprise de la fabrication ou celle des représentations ou exécutions publiques, sous l'autorité d'un administrateur constitué séquestre, pour le compte de qu'il appartiendra, des produits de cette fabrication ou de cette exploitation.

Le président du tribunal civil statuant en référé peut, s'il fait droit à la demande du saisi ou du tiers saisi, ordonner à la charge ou demandeur la consignation d'une somme affectée à la garantie des dommages et intérêts auxquels l'auteur pourrait prétendre.

Article 68.-

Faute par le saisissant de saisir la juridiction compétente dans les trente jours de la saisie, mainlevée de cette saisie pourra être ordonnée à la demande du saisi ou du tiers saisi par le président du tribunal, statuant en référé.

Article 69.-

Lorsque les produits d'exploitation revenant à l'auteur d'une oeuvre de l'esprit auront fait l'objet d'une saisie-arrêt, le président du tribunal civil pourra ordonner le versement à l'auteur, à titre alimentaire, d'une certaine somme ou d'une quotité déterminée des sommes saisies.

CHAPITRE II.- Sanctions.

Article 70.-

L'article 425 du Code pénal est complété ainsi qu'il suit:

«La contrefaçon, sur le territoire français, d'ouvrages publiés en France ou à l'étranger, est punie d'une amende de 36.000 à 1.200.000 F.

«Seront punis des mêmes peines le débit, l'exportation et l'importation des ouvrages contrefaits.»

Article 71.-

L'article 426 du Code pénal est modifié ainsi qu'il suit:

«Est également un délit de contrefaçon toute reproduction, représentation ou diffusion, par quelque moyen que ce soit, d'une oeuvre de l'esprit en violation des droits de l'auteur, tels qu'ils sont définis et réglementés par la loi.»

Article 72.-

L'article 427 du Code pénal est modifié ainsi qu'il suit:

«La peine sera de trois mois à deux ans d'emprisonnement et de 80.000 à 2 millions de francs d'amende, s'il est établi que le coupable s'est livré, habituellement, aux actes visés aux deux articles précédents.

«En cas de récidive, après condamnation prononcée en vertu de l'alinéa qui précède, la fermeture temporaire ou définitive des établissements exploités par le contrefacteur d'habitude ou ses complices pourra être prononcée.

«Lorsque cette mesure de fermeture aura été prononcée, le personnel devra recevoir une indemnité égale à son salaire, augmenté de tous les avantages en nature, pendant la durée de la fermeture et au plus pendant six mois.

«Si les conventions collectives ou particulières prévoient, après licenciement, une indemnité supérieure, c'est celle-ci qui sera due.

«Toute infraction aux dispositions des deux alinéas qui précèdent sera punie d'un emprisonnement d'un à six mois et d'une amende de 15.000 à 150.000 F.

«En cas de récidive, les peines seront portées au double.»

Article 73.-

L'article 428 du Code pénal est modifié ainsi qu'il suit:

«Dans tous les cas prévus par les articles 425, 426 et 427, les coupables seront, en outre, condamnés à la confiscation de sommes égales au montant des parts de recettes produites par la reproduction, la représentation ou la diffusion illicite, ainsi qu'à la confiscation de tout matériel spécialement installé en vue de la reproduction illicite et de tous les exemplaires et objets contrefaits.

«Le tribunal pourra ordonner, à la requête de la partie civile, la publication des jugements de condamnation intégralement ou par extrait, dans les journaux qu'il désignera et l'affichage desdits jugements dans les lieux qu'il indiquera, notamment aux portes du domicile, de tous établissements, salles de spectacles, des condamnés, le tout aux frais de ceux-ci, sans toutefois que les frais de cette publication puissent dépasser le maximum de l'amende encourue.

«Lorsque l'affichage sera ordonné, le tribunal fixera les dimensions de l'affiche et les caractères typographiques qui devront être employés pour son impression.

«Le tribunal devra fixer le temps pendant lequel cet affichage devra être maintenu, sans que la durée en puisse excéder quinze jours.

«La suppression, la dissimulation ou la lacération totale ou partielle des affiches sera punie d'une amende de 300 à 1.500 F. En cas de récidive, l'amende sera portée de 36.000 à 72.000 F et un emprisonnement de onze jours à un mois pourra être prononcé.

«Lorsque la suppression, la dissimulation ou la lacération totale ou partielle des affiches aura été opérée volontairement par le condamné, à son instigation ou sur ses ordres, il sera procédé de nouveau à l'exécution intégrale des dispositions du jugement relatives à l'affichage, aux frais du condamné.»

Article 74.-

L'article 429 du Code pénal est modifié ainsi qu'il suit:

«Dans les cas prévus par les articles 425, 426, 427 et 428, le matériel ou les exemplaires contrefaits, ainsi que les recettes ou parts de recettes ayant donné lieu à confiscation, seront remis à l'auteur ou à ses ayants droit pour les indemniser d'autant du préjudice qu'ils auront souffert; le surplus de leur indemnité ou l'entière indemnité s'il n'y a eu aucune confiscation de matériel, d'objets contrefaits ou de recettes, sera réglée par les voies ordinaires.»

Article 75.-

Outre les procès verbaux des officiers ou agents de police judiciaire, la preuve de la matérialité d'une représentation, d'une exécution ou d'une diffusion quelconque, ainsi que celle de toute infraction aux dispositions de l'article 46, pourra résulter des constations d'un agent désigné par les organismes professionnels d'auteurs, agréé par le ministre chargé des arts et des lettres et assermenté dans les conditions prévues par un règlement d'administration publique.

Article 76.-

Dans le cas d'infraction aux dispositions de l'article 42, l'acquéreur et les officiers ministériels pourront être condamnés solidairement, au profit des bénéficiaires du droit de suite, à des dommages-intérêts.

TITRE V.- Dispositions diverses.

Article 77.-

Sont abrogées toutes dispositions contraires à celles de la présente loi, et notamment:

Les articles 2, 3, 4 et 5 du décret des 13-19 janvier 1791 relatif aux spectacles;

Le décret des 19 juillet-6 août 1791 relatif aux spectacles;

Le décret des 19-24 juillet 1793, modifié par la loi du 11 mars 1902, relatif aux droits de propriété des auteurs d'écrits en tous genres, des compositeurs de musique, des peintres et des dessinateurs;

Les articles 1er et 2 de la loi du 1er septembre 1793 relative aux théâtres et au droit de représentation et d'exécution des oeuvres dramatiques et musicales;

Le décret du 25 prairial an III (13 juin 1795) interprétatif de celui du 19 juillet 1793 qui assure aux auteurs et artistes la propriété de leurs ouvrages;

Le décret du 1er germinal an XIII (22 mars 1805) concernant les droits des propriétaires d'ouvrages posthumes;

Les articles 10, 11 et 12 du décret du 8 juin 1806 concernant les théâtres;

Les articles 40, 41 (7°), 42, 43, 44 du décret du 5 février 1810 contenant règlement sur l'imprimerie et la librairie;

Le décret des 28 et 30 mars 1852 relatif à la propriété des ouvrages littéraires et artistiques publiés à l'étranger;

La loi du 14 juillet 1866 sur les droits des héritiers et des ayants cause des auteurs;

La loi du 11 mars 1902 étendant aux oeuvres de sculpture l'application de la loi des 19-24 juillet 1793 sur la propriété artistique et littéraire;

La loi du 9 avril 1910 relative à la protection du droit des auteurs en matière de reproduction des oeuvres d'art;

La loi du 10 novembre 1917 portant abrogation de la loi du 16 mars 1866 sur la fabrication et la vente des instruments de musique mécanique;

La loi du 20 mai 1920 frappant d'un droit au profit des artistes les ventes publiques d'objets d'Article

Article 78.-

Le premier alinéa de l'article 4 de la loi nº 52-300 du 12 mars 1952 est ainsi modifié:

«La contrefaçon en vue de la vente ainsi que l'exposition, la mise en vente, le débit, l'introduction sur le territoire douanier ou l'exportation de produits réputés contrefaits, sont punis des peines prévues à l'article 425 du Code pénal. Ces produits contrefaits pourront, en outre, être confisqués.»

Article 79.-

Les dispositions de la présente loi entreront en vigueur à l'expiration d'un délai d'un an à compter de sa promulgation.

Des règlements d'administration publique détermineront les conditions d'application de la présente loi, notamment en ce qui concerne les articles 42 et 75.

Article 80.-

La présente loi est applicable à l'Algérie sous les réserves suivantes lorsque l'auteur a conservé son statut personnel.

Le droit de divulgation est exercé après la mort de l'auteur par les exécuteurs testamentaires que ce dernier a désignés; à leur défaut ou après leur décès et sauf volonté contraire de l'auteur, par ses héritiers dans l'ordre successoral fixé par le statut personnel de l'auteur.

Les dispositions des articles 24 et 25 ne s'appliquent pas dans ce cas.

Article 81.-

La présente loi est applicable aux territoires d'outre-mer et au Cameroun à l'expiration du délai prévu à l'alinéa 1er de l'article 79. Un règlement d'administration publique en déterminera les conditions d'application, notamment en ce qui concerne l'alinéa 4 de l'article 45 et compte tenu du statut personnel des populations intéressées.

Article 82.-

Un règlement d'administration publique déterminera les conditions d'adaptation aux département d'outre-mer de l'alinéa 4 de l'article 45.

La présente loi sera exécutée comme loi de l'Etat.

 

Fait à Paris, le 11 mars 1957.

 

 

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